Notre langue molle

Dans le reportage diffusé au Téléjournal lundi soir sur la première audience publique de la Commission Bouchard-Taylor, deux des derniers commentaires choisis comme exemple m’ont fait réagir, puisque c’est un sujet qui revient souvent et qui m’importe beaucoup : la langue française. Un homme déclare avec dépit qu’il ne peut dialoguer avec les immigrants de son quartier autrement qu’en anglais alors qu’un autre homme, immigrant lui-même et parlant parfaitement français, remet sur la table la piètre qualité du français des Québécois pour défendre les immigrants sur la question du choix d’apprendre l’anglais, au lieu du français. Désolé, mais je ne comprends pas ce réflexe de défense qui mélange ainsi deux questions très différentes.

Même si je suis d’accord pour dire qu’une bonne connaissance du français est importante pour tous, je ne crois pas qu’il faille attendre de voir la qualité de la langue augmenter avant de pouvoir se positionner sur la question linguistique, en lien avec l’immigration. Cela serait doublement suicidaire. Et je ne crois pas non plus que l’on demande (ni demanderait) aux immigrants non francophones d’écrire dans un français parfait dès qu’ils arrivent ici; il y a une marge : un français de base pour pouvoir converser un minimum et ainsi les aider à apprendre plus amplement serait appréciable, et synonyme de respect envers la société d’accueil.

Je parlais de différence, mais, d’un autre côté, ces deux questions ne sont pas si différentes, finalement : la qualité du français des Québécois concerne notre culture, et la question du choix linguistique des immigrants est intimement liée à la pérennité et à l’évolution de cette culture francophone, dans un contexte où la démographie demande un apport élevé en immigration. Alors, de les mettre en contradiction comme le fait cet homme est absurde, à mon sens. Qui ne voudrait pas de ces gens qui peuvent enrichir notre langue en la parlant avec nous? Tous ceux qui partagent cette pensée veulent en quelque sorte nous punir collectivement de ne pas avoir bien fait nos devoirs? Quelquefois, je crois que le passé n’est pas si garant de l’avenir, et dans ce cas-ci c’est bien vers l’avenir qu’il faut regarder pour pouvoir anticiper.

Donc, pour l’avenir, il est évident que la santé du français au Québec passe par une immigration la plus francophone possible, et pour les autres, par une ouverture plus grande à des candidats intéressés à s’intégrer par la langue française, premièrement. Ce qui, j’en ai bien peur, devra passer par un contrôle gouvernemental majoritairement québécois sur le processus de choix des nouveaux arrivants.

7 Réponses to “Notre langue molle”


  1. 1 Y-man septembre 12, 2007 à 11:30

    La question de langue à Gatineau est peut-être différente parce que nous demeurons juste a coté de l’Ontario alors nous nous retrouvons avec des immigrants qui parlent anglaiseulement mais qui travaille en Ontario ou pour le gouvernement fédéral donc qui n’ont pas nécéssairement besoin de parler français et ici à Gatineau presque tous les gens sont bilingues fonctionnels donc si tu vas à l’épicerie ou au café du coin tu peux te faire servir entièrement en anglais. D’ou le fait que langue et immigration sont peut être plus intimement lié mais je suis en accord avec toi, les accomodements et la langue sont deux choses différentes. Pour faire une deuxième commentaire après avoir témoigné à la Commission et écouté quelque présentation et celle de lundi soir à RDI, il y a plusieurs Gatinois qui ont mélangé des choses avec les accomodements raisonnables et pas toujours de la bonne façon.

  2. 2 Gradlon septembre 12, 2007 à 11:51

    Salut Renart,

    J’arrive à concevoir qu’un immigrant qui apprend le français en classe, un français généralement international, puisse éprouver de la difficulté à converser avec un Québécois par la suite.

    Mais bon, il faut persister et signer: les immigrants qui s’établissent au Québec doivent apprendre le français et le maîtriser avant de pouvoir apprendre l’anglais.

    Dans cette optique, peut-être devrions-nous exiger la même chose des Québécois d’origine canadienne-française!

  3. 3 Renart L'éveillé septembre 12, 2007 à 15:10

    Y-man,

    ce que tu me rapportes ici représente bien pour moi le problème avec le bilinguisme canadien, qui semble seulement faire grossir le nombre d’allophones qui ont comme deuxième langue l’anglais et les unilingues anglais.

    Donc, à mon avis le bilinguisme et le multiculturalisme sont des tares pour le Québec, la province qui est déjà la plus bilingue au Canada. Il est temps de prioriser le français pour vrai (autant dans son enseignement et de sa maîtrise).

    Gradlon,

    Pour ton premier point, je peux te parler de mon expérience personnelle. À mon travail il y a beaucoup de français et ils nous comprennent très bien. Le dernier arrivé, fraîchement débarqué depuis à peine deux semaines, utilisait déjà quelques tournures de phrases québécoises. Alors, je crois que ce n’est que de l’adaptation et un désir de s’intégrer qui fait la différence.

    Pour la maîtrise du français, je suis d’accord, mais c’est facile pour nous d’écrire ça puisque nous avons déjà un bon français écrit…

  4. 4 Y-man septembre 12, 2007 à 19:48

    si tu savais comment c’est difficile de se faire servir en français correct dans les services fédéraux ici. Je travaille pour le fédéral et combien de fois je vois des francophones parler anglais dans des réunions parce qu’il y a un anglophone à la table qui ne comprend pas le français. Ici on chiale beaucoup sur la langue mais les Canadien-françcais (pour inclure l’Ontario aussi) sont souvent leurs pires ennemis en ne s’affirmant pas mais en préférant faire l’assimilé probablement du à un manque de fierté.
    Autre facteur beaucoup de Québecois travaillent pour le gouvernement fédéral donc dans un environnment anglophone il devient alors difficile de prioriser le français pour eux même s’ils devraient.

  5. 5 Renart L'éveillé septembre 13, 2007 à 7:11

    Merci Y-man pour ce commentaire, il vient confirmer encore plus le manque de colonne ou plutôt l’empathie mal placée des francophones, surtout les billingues. On lance un maudit beau message aux anglophones…

    En passant, je viens de cliquer, Y-Man ça vient de RBO?

  6. 6 Regard urbain septembre 13, 2007 à 11:14

    Intéressant, ton texte sur Bouchard-Taylor. Pourquoi ai-je ignoré l’existence de ce blog fantastique pendant si longtemps? PLus maintenant, justice est rendue!


  1. 1 Québécois, au petit coin! « Rétrolien sur janvier 6, 2008 à 17:36

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