J’ai eu une discussion dernièrement avec Philippe David, le droitiste le plus sympathique que je connaisse (et, en passant, j’invite cordialement les autres droitistes capables de débattre sans trop se maquiller du dénigrement antigogauche primaire à se joindre à nous), au sujet du travail des enfants dans les pays du tiers-monde. Notre désaccord concerne surtout la primauté et la malléabilité de l’éthique. Moi je crois que l’éthique devrait primer : si le travail des enfants est inacceptable ici, il l’est tout autant pour ce qui est des enfants là-bas. Lui, de son côté, croit que c’est un moindre mal puisque ce serait seulement une étape vers une amélioration des conditions économiques de leur pays.
Incompatibilité manifeste, car en gros, mon analyse se porte vers le général, au contraire du particulier, sur un refus du statu quo, donc un remaniement total et titanesque de notre rapport au monde, tant au niveau sociétal qu’individuel : l’éthique comme grille d’analyse afin de modeler à notre image la mondialisation, au-delà de ces soi-disant avantages économiques, en majorité unilatéraux.
Je suis peut-être naïf, mais je ne crois pas qu’il est justifié de penser que les populations des pays pauvres ont à faire obligatoirement le même chemin de Damas que nous vers l’Illumination consommatoire. Nous ne sommes pas le modèle à suivre, et l’important réside à tirer les familles de l’extrême pauvreté, les entreprises n’étant que des outils pour arriver à cela. De plus, nous devrions tendre vers des vies modestes, par respect pour la vie, dans ce qu’elle a de plus magique. Et il n’y a rien de magique dans la mécanique économique, tout n’est que tentative de prédiction, et nous sommes loin de la mystique…
Justement, en parlant de prédiction, alors « que l’effondrement du marché de l’habitation a fait une hécatombe à Wall Street, John Paulson, gestionnaire d’un fonds spéculatif peu connu qui a flairé la débâcle deux ans plus tôt, en sort triomphant.
Ses fonds, qui affichaient une hausse de 15 milliards US en 2007 en raison d’un pari spectaculaire contre le marché du logement, lui ont permis d’empocher personnellement entre 3 et 4 milliards US — soit, paraît-il, le salaire annuel le plus élevé de l’histoire de Wall Street. »
Voilà un événement qui fait plaisir aux uns et déprime les autres, dont moi, qui trouve qu’une concentration de richesse de la sorte et aussi rapidement en une seule personne est indécente. La preuve, même le principal intéressé, que ce soit vrai ou faux, en son for intérieur, « a essayé d’être discret, expliquant qu’il répugne à célébrer tandis que la crise du logement cause tant de malheurs à d’autres. Il a dit à ses amis qu’il augmenterait ses dons de charité. En octobre, il a versé 15 millions de dollars au Center for Responsible Lending (Centre pour des prêts responsables) en vue de fournir de l’aide juridique aux familles frappées de forclusion. » On sent ici poindre un minimum d’éthique, effet de mode ou réelle gêne?
Je doute que l’on découvre un jour la réponse, mais 15 millions, ça reste quand même de la menue monnaie…
(Photo : omk1)
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