Je vais vous parler d’art, mais, s’il vous plait, lisez un peu avant d’aller voir ailleurs. Pour ceux qui ne sont pas très à l’aise avec l’art contemporain, je vais tenter de vous emmener quelque part où vous n’avez jamais été, en dépit de l’avis que vous allez avoir à la fin du texte. Vos tomates n’en seront que plus juteuses.
Ce ne sera que des mots. Ce ne sera pas de l’art abstrait, ce ne sera pas des excréments en guise de sculpture. Des mots comme les autres, presque les mêmes que dans le Journal de Montréal. Dans un autre ordre. Et, en plus, je n’ai jamais été subventionné…
Car je comprends que, souvent, les propos des artistes (et je ne parle pas des vedettes de la télé, qui galvaudent ce terme à outrance, même si on ne sait pas trop c’est à qui la faute…) peuvent paraître un peu absurdes pour quelqu’un qui n’est pas à l’aise avec ça, mais je vais tenter quelque chose avec vous. N’ayez pas peur.
Alors, quand j’étais étudiant en art, au début des années 90, j’ai eu une idée de performance (ou une action) que je n’ai jamais mise à exécution, car, comme vous le verrez, malgré la noblesse de la cause, il y avait un problème moral (et légal) qui me chicotait.
Le thème de ma performance était l’environnement (ce n’était pas très à la mode dans ce temps-là…). La logique de mon idée concernait le concept de l’ébouage, de tout le système de ramassage des ordures et de leur enfouissement dans les dépotoirs. Je pensais que les gens — et je le pense toujours — sont insensibles aux problèmes de la pollution par les déchets ménagers parce que premièrement ces déchets sont rassemblés dans des sacs verts et des poubelles : cachez ce sein que je ne saurais voir! Aussi, parce que ces déchets disparaissent comme par enchantement pendant qu’on a le dos tourné : un camion d’éboueur n’est pas très invitant pour le regard… Alors, j’ai toujours en tête l’image de balayer la poussière en dessous du tapis : l’humanité a toujours eu tendance à faire ça, malheureusement.
Donc, le coup que je voulais faire était du vandalisme pur et simple, et je voulais que quelqu’un me filme pour diffuser ce document dans un contexte d’exposition plus tard : je voulais me promener dans les rues un jour où les gens laissent leurs sacs d’ordures dehors et les détruire, étendre leur contenu partout, foutre un bordel monstre! Je voulais que les gens voient là, étendu devant leurs yeux, la quantité de choses qu’ils jettent. Mais qu’est-ce qui est le plus absurde? La situation de la pollution, ou la performance que je voulais faire?
Oui, je sais, certains répondront que c’est mon idée qui est la plus absurde. Je suis d’accord, c’est un coup d’éclat qui ne pourrait être clair pour tout le monde, et c’est entre autres pour ça que je ne l’ai jamais fait. Et, c’est pour ça aussi que je vous le raconte ici. Je ne fais de mal à personne en exposant cette vue de l’esprit — et encore moins à ceux qui n’ont pas continué leur lecture jusqu’ici — je ne fais que mettre de l’avant un problème quasi philosophique. À vous de le regarder avec votre propre jugement, votre propre talent, à partir de vos valeurs et vos connaissances. Et de surtout en parler à votre manière. Mais de grâce, ne tuez pas le messager même s’il ne parle pas comme les autres.
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